La loi, c’est moi ! ». Telle est la profession de foi de l’Etat primitif que nous a légué le système abrutissant du PDG-Sékou Touré (ce n’est pas moi mais Alpha Condé -alors, président de la FEAF- en personne qui a inventé ce drôle de sobriquet !). Un Etat fondé non sur le principe mais sur l’individu c’est-à-dire sur l’humeur et sur la désinvolture !
On hurle, on ordonne, on décrète comme on veut sans respecter les règles, sans tenir compte de la hiérarchie, sans suivre la procédure. Le Lieutenant-Colonel, Mamadi Doumbouya pousse jusqu’à la caricature cette étrange manière de gouverner.
Comment qualifier un président qui convoque le personnel d’un ministère sans passer ni par le Premier Ministre ni par le ministre de tutelle ? C’est sans conteste, un président qui dévalorise et sa fonction et celle de ses collaborateurs ! Comment voulez-vous qu’un chef d’Etat-major normalement constitué puisse respecter un collègue qui s’occupe de vider de leurs maisons des individus soupçonnés de les occuper illégalement ?
Dans tout pays normal, une telle tâche revient aux greffiers et aux huissiers voire aux plantons et aux domestiques. Un chef d’Etat-major a autre chose à faire, tout de même !
Le ministère de la justice vient de suspendre l’excellent juge, Alphonse Wright simplement parce que celui-ci a osé rappeler à un gradé qu’il n’est pas officier de police judiciaire et que donc il n’a pas à convoquer qui il veut comme il veut. A ce propos, le brillant avocat, Maître Mohamed Traoré nous a cité les trois règles selon lesquelles, un gendarme ou un policier peut se prétendre officier de police judiciaire. Apparemment, le Colonel Samoura (du reste, lui-même suspendu, on ne sait trop pourquoi !) qui se réclame officier de police judiciaire n’en remplit pas les critères. Bonjour, la cacophonie !
Mais bon, nous sommes en Guinée, le seul pays au monde où on n’a pas besoin de remplir les critères d’une fonction pour l’exercer. Ici, n’importe qui peut faire n’importe quoi. On a vu Lansana Conté aller lui-même sortir de prison un détenu à l’insu des autorités compétentes et sans même prendre la peine de pondre un décret de grâce. Récemment, on a vu Mamadi Doumbouya dépêcher des bidasses armés jusqu’aux dents juste pour déposer un avis d’expulsion. Démonstration de force ou aveu d’impuissance ? Est-ce vraiment ainsi qu’un Etat digne de ce nom manifeste son autorité ?
« La loi, c’est moi ! »
De Sékou Touré, à Mamadi Doumbouya, en passant par Lansana Conté et les autres, en Guinée, ce sont des individus qui font la loi. Ce n’est ni le bons sens ni la raison, à plus forte raison, la légitime initiative de la majorité. Et quels individus, mon dieu ! Des gus furibards et rancuniers, qui utilisent les moyens de l’armée pour régler des comptes personnels. Que savent-ils faire, au fond, à part crier, insulter, décapiter les honnêtes gens et démolir le peu qu’ils ont trouvé de construit ?
Soyons francs, Guinéens, avez-vous trouvé chez un seul de nos présidents, cette réserve, cette sérénité, cette profondeur d’esprit bref, cette componction qui fait la marque de fabrique d’un véritable homme d’Etat ? Evidemment, que non !
Ces Assises nationales n’ont aucun sens. L’Etat guinéen n’est pas à refonder : il est à créer de toute pièce, de toute urgence. Tout simplement parce qu’il n’a jamais existé.
Par Tierno Monénembo