« Il s’agit de la pire atrocité signalée dans le conflit armé qui dure depuis dix ans ». Au Mali, environ 300 civils, dont certains étaient des combattants islamistes présumés, ont été sommairement exécutés, fin mars, par les forces armées maliennes et des soldats étrangers dans la ville de Moura, dans le centre du pays, dénonce Human Rights Watch dans un rapport publié ce mardi 5 avril 2022.
Le rapport explique que les enquêtes de l’ONG ont révélé qu’en plusieurs jours fin mars, les forces de l’armée malienne et des soldats étrangers, identifiés par plusieurs sources comme russes du groupe Wagner, ont exécuté en petits groupes plusieurs centaines de personnes qui avaient été arrêtées à Moura.
Un communiqué du ministère malien de la Défense du 1er avril indiquait que du 23 au 31 mars, l’armée avait tué 203 « terroristes » et arrêté 51 autres. Le document indique que l’armée a agi sur la base de renseignements suggérant que des islamistes armés planifiaient une « réunion avec différents Katibats à Moura.
« Les exactions commises par des groupes islamistes armés ne justifient en rien le massacre délibéré de personnes détenues par l’armée », a indiqué Corinne Dufka, directrice de la division Sahel à Human Rights Watch.
Selon elle, « le gouvernement malien est responsable de cette atrocité, la pire au Mali depuis une décennie, qu’elle soit perpétrée par les forces maliennes ou par des soldats étrangers associés. »
Human Rights Watch s’est entretenu avec 27 personnes au courant des meurtres, dont des témoins de la région de Moura et des commerçants, des dirigeants communautaires, des diplomates étrangers et des analystes de la sécurité. L’un d’entre eux témoigne : « Je vivais dans la terreur, chaque minute, chaque seconde en pensant que ce serait à mon tour d’être emmené et exécuté. Même après qu’on m’ait dit d’y aller, je craignais que ce ne soit un piège. Alors que je m’éloignais, lentement, je tenais ma main sur ma poitrine, retenant mon souffle et attendant qu’une balle traverse mon corps. »
« La grande majorité des personnes tuées par l’armée malienne et les forces alliées étaient des hommes de l’ethnie pastorale peul, ou peule », indique-t-on.
« Le gouvernement malien devrait enquêter de toute urgence et impartialement sur ces massacres, y compris sur le rôle des soldats étrangers », souligne Mme Dufka, qui appelle le gouvernement malien à demander l’aide de l’Union africaine et des Nations Unies pour que ces ‘’enquêtes soient suffisamment indépendantes et crédibles’’.
Depuis plusieurs années, Moura vit sous le joug des terroristes de la Katiba Macina, qui appartient au GSIM, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans lié à Aqmi, qui viennent régulièrement dans le village prélever la zakat, prêcher et s’approvisionner.
Par Guinee28