L’alliance National pour l’alternance et la démocratie (ANAD) a dénoncé ce mercredi 29 novembre 2023 la gestion de la transition par le colonel Mamadi Doumbouya.
Dans une déclaration cette alliance, dirigée par Cellou Dalein Diallo qui vit toujours en exil à Dakar au Sénégal, accuse la junte de tout mettre en œuvre pour s’enrichir illicitement et s’éterniser au pouvoir. Face à cette situation, l’ANAD avertit qu’aucun glissement du chronogramme de la transition ne sera accepté.
Déclaration :
L’enlisement de la transition, en raison de sa gestion unilatérale et autoritaire, et le dévoiement de sa vocation principale, celle du retour à l’ordre constitutionnel par l’organisation d’élections libres et crédibles, a achevé de plonger notre pays dans l’angoisse, l’incertitude et la lassitude. S’il est un constat largement partagé par une grande majorité de Guinéens, c’est que l’arrivée au pouvoir du CNRD, le 5 septembre 2021, loin d’ouvrir une transition, marque plutôt la continuité d’un régime autoritaire qui entend s’accrocher au pouvoir aussi longtemps que possible et gouverner par la seule force des armes et non du droit.
En effet, plutôt que de rompre avec les erreurs du passé que le Président de la transition, Mamadi Doumbouya résumait comme suit : «l’instrumentalisation des institutions républicaines, de la justice, le piétinement des droits des citoyens, l’irrespect des principes démocratiques, la politisation à outrance de l’administration publique, la gabegie financière, la pauvreté et la corruption endémique… », il les a répétées et amplifiées à la vitesse de la lumière.
Au rang des nombreux manquements aux engagements du CNRD, l’on peut noter : L’élaboration unilatérale de la Charte de la transition et sa violation délibérée et répétée dont l’article 77 prévoit : « La durée de la transition sera fixée de commun accord entre les Forces Vives de la Nation et le Comité National du Rassemblement pour le Développement ; L’hyper présidentialisation du régime réduisant ainsi au statut d’assujettis le gouvernement, le CNT et les organes judiciaires se traduisant par une concentration des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire dans les mains du CNRD, les militaires décident de tout, tout seuls, sans concertation aucune :
Le refus, dans le mépris et l’arrogance, de répondre à l’appel au dialogue sur la transition des forces vives les plus représentatives de la nation ;
La mise en place du gouvernement de la transition sans concertation politique préalable ; La désignation autoritaire des membres du CNT en imposant à la présidence de l’Institution une personnalité controversée dans le pays et la sous-représentation des partis politiques en son sein ;
La volonté dissimulée du CNRD de rester au pouvoir aussi longtemps que possible illustrée notamment par l’imposition d’un chronogramme irréaliste et onéreux (600 millions de dollars US) incluant le RGPH et le RAVEC, deux opérations longues et coûteuses, comme moyen de génération du fichier alors qu’une révision classique aurait suffit ; Le transfert au MATD de la responsabilité d’organiser les élections, en lieu et place d’un Organe de Gestion des Élections (OGE) indépendant et consensuel, en violation de la Charte de la transition et des engagements internationaux de la Guinée notamment la charte africaine sur la démocratie, les élections et la bonne gouvernance ainsi que le protocole additionnel de la CEDEAO ;
L’instrumentalisation à outrance de la Justice par l’Exécutif à des fins politiques et sa «…théâtralisation, désacralisation, banalisation, infantilisation» pour citer l’AMG ;
Les multiples atteintes portées à la liberté de la presse avec la répression de journalistes, le démantèlement par effraction des émetteurs du Groupe de presse AfricVision, le brouillage des ondes des radios FIM FM et Djoma FM, ainsi que le sabotage de la presse en ligne (Guinée matin, inquisiteur) et des réseaux sociaux commandités pour faire taire toutes les voix dissonantes ;
Le gel des comptes et la dissolution ciblée des Conseils communaux pour les remplacer par des délégations spéciales en violation flagrante du Code des collectivités locales ; La décision de nomination des membres des Conseils de quartier et de District par les gouverneurs de région, une atteinte grave à la démocratie locale, notamment au principe de la libre administration des collectivités locales ;
La réquisition illégale de l’armée par le MATD pour le maintien et le rétablissement de l’ordre public ;
Les nombreuses nominations à caractère ethnique dans l’administration publique entrainant une rupture d’égalité entre citoyens, le mérite n’étant plus le critère de choix.
La restriction des droits et libertés des citoyens dont la liberté de réunion et d’association, la liberté d’expression et d’information et l’interdiction générale et absolue de manifester dans la rue et sur les places publiques à l’exception des mouvements de soutien au CNRD ;
La diatribe de Doumbouya contre la démocratie qui, selon lui, « a du mal à s’adapter à nos réalités, à nos coutumes, à notre environnement « , à la tribune des Nations Unies est une preuve éloquente de sa méconnaissance des textes fondateurs de l’Union Africaine (I’UA) et la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) ;
La course effrénée à l’enrichissement illicite et la corruption à grande échelle caractérisée notamment par le recours abusif au gré à gré avec son lot de surfacturations, malversations et rétro commissions ;
Les assassinats répétitifs en toute impunité, de plusieurs manifestants par les forces de défense et de sécurité dans le cadre de manifestations pacifiques.
Tous ces manquements et violations graves ont altéré profondément le climat sociopolitique, conduit à la situation de blocage actuelle et transformé cette transition en un véritable cas d’école de démagogie populiste où le superflu l’emporte sur l’essentiel.
En l’absence d’un chronogramme crédible et d’un budget réaliste des élections, d’un Organe de gestion de ces élections, d’un Code électoral, d’un opérateur technique, d’un Fichier électoral, l’on peut soutenir, deux ans après le putsch, que la volonté politique de diligenter le retour à l’ordre constitutionnel dans le respect des règles et des principes de la démocratie et de l’État de droit n’existe plus au niveau de la junte guinéenne. L’ANAD réitère son engagement à se battre résolument pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel étant entendu qu’aucun glissement de calendrier ne sera accepté.
VIVE L’ANAD.
VIVE LA DÉMOCRATIE.
VIVE LA GUINÉE UNIE ET INDIVISIBLE.