Des défenseurs des droits humains en Guinée ont demandé samedi à la junte de revenir sur sa décision de rebaptiser l’aéroport de la capitale Conakry du nom du père de l’indépendance Ahmed Sékou Touré, un « tyran » ayant fait des « milliers de victimes ».
Ahmed Sékou Touré a dirigé la Guinée de l’indépendance en 1958 jusqu’à sa mort en 1984. Troquant ses premiers habits de dirigeant progressiste, il s’est mué en dictateur, gouvernant son pays d’une main de fer. Selon les organisations de défense des droits humains, son régime est responsable de la mort ou de la disparition de 50.000 personnes.
Au cours d’une conférence de presse à Conakry, Abdoulaye Conté, le secrétaire exécutif de l’association des victimes du Camp Boiro (AVCB), s’est dit « consterné » et « choqué » par la décision de rebaptiser l’aéroport. Sékou Touré a été « le premier président de la Guinée indépendante, c’est vrai », mais « nous parlons d’un tyran qui laisse derrière lui des milliers de victimes dans les fosses communes ». « Comment la Guinée peut oublier son histoire ? », a-t-il poursuivi. Cette décision du chef de la junte, envoie « aux oubliettes les victimes, banalise les crimes ».
Il a réclamé le « retrait pur et simple » du décret rebaptisant l’aéroport, lu jeudi soir à la télévision publique et qui selon lui « divise la Guinée ».
Le Premier ministre Mohamed Béavogui, un civil nommé par les militaires ayant pris le pouvoir le 5 septembre, a déclaré vendredi à un site internet d’information guinéen être « surpris et mécontent » de la décision de la junte.
Ahmed Sékou Touré divise les Guinéens qui, selon les cas, voient en lui un héros tiers-mondiste ayant tenu tête à l’ancienne puissance coloniale française ou retiennent son exercice autoritaire du pouvoir, marqué par des purges et des tortures.
Belga