La décision de la CENI de fixer les cautions à payer par les candidats aux élections communales est illégale. Cette décision est passée comme lettre à la poste sans aucune réaction des partis politiques potentiellement candidats à ces élections. C’était le cas, d’ailleurs, pour toutes les élections organisées en Guinée depuis 2010. Nous devons être vraiment inquiets pour notre pays, c’est la preuve que nos intérêts nationaux ne sont pas dans de bonnes mains. Lorsque la classe dirigeante est incapable de lire les textes fondamentaux et les règlements qui régissent les activités politiques, économiques du pays, oui, il faut être inquiet. La médiocrité s’est trop fortement enracinée dans notre pays. Nous ne décaissons que moins de 50% des ressources financières qui nous sont allouées par méconnaissance des procédures des bailleurs de fonds et incapacité de monter des projets bancables. La majorité de nos textes sont rédigés par des experts (peut-être c’est pourquoi nous ne prenons pas la peine de les lire) comme la Loi organique relative aux lois de Finances et Règlement Général sur la Gestion Budgétaire et la Comptabilité Publique. Elle était inapplicable, parce qu’une institution essentielle comme la Cour des Comptes n’existait pas, rendant ainsi illégal toutes les lois de finances votées par l’Assemblée nationale. Je cite cet exemple, parce qu’il touche à notre porte-monnaie. Tout est fait de travers et les étrangers nous regardent avec ébahissement. Il y a du chemin à faire en Guinée.
Voici l’article dans le titre 7 : Des dispositions financières de la loi organique portant Code électoral, qui traite de la caution à verser par les candidats pour les élections présidentielles et les élections législatives qui sont les seules concernées. La CENI n’a pas à outrepasser les dispositions de la loi et donc par conséquent, conformément à l’article 2 alinéa 7 de la Constitution : Toute loi, tout texte règlementaire et acte administratif contraires à ses dispositions sont nuls et de nul effet.
Article 192 : Sur proposition d’une Commission Financière composée de :
Le président de la CENI ou son représentant, Président
Le Ministre chargé des Finances ou son représentant, Rapporteur
Le Ministre chargéde l’Administration du Territoire ou son représentant, membre
Un représentant de chacun des partis politiques engagés dans les élections, membre
Le président de la CENI fixe par décision, soixante-dix (70) jours au plus, soixante (60) jours au moins avant le scrutin, le montant du cautionnement à verser au Trésor Public contre récépissé par les candidats ou les mandataires des partis politiques prenant part aux élections, dans les délais ci-après :
Pour les élections présidentielles, quarante (40) jours au moins, cinquante-neuf (59) jours au plus avant celui du scrutin;
Pour les élections législatives, soixante (60) jours au moins et soixante-neuf (69) jours au plus avant celui du scrutin.
Il fixe également le plafonnement du montant global des dépenses pouvant être engagées par candidat ou un parti politique prenant part à une élection législative ou présidentielle.
Comme vous voyez la loi est claire, nulle part il n’est question de caution à payer pour les élections locales, c’est-à-dire les élections communales et les élections des quartiers et districts. J’ai vérifié ce que dit la loi à ce sujet, parce que des membres de notre parti AFD se présentent sur des listes indépendantes. Comment des partis politiques peuvent-ils s’engager dans des élections aussi importantes, dans une ignorance totale des textes qui règlementent ces élections? Toutes les cautions fixées depuis la présidentielle de 2010, l’ont été en l’absence des représentants des partis politiques dans cette Commission Financière où ils auraient pu peser sur les décisions qui ont porté sur des montants astronomiques. C’est très inquiétant. Pourquoi s’étonner qu’ils vont dialoguer sans les outils de travail que sont la Constitution et le Code électoral. La CENI n’a jamais appliqué la loi qui l’a institué, à plus forte raison le Code électoral. Tout est fait selon leur bon vouloir. Tout cela ne dérange personne, on est content de vivre dans un pays hors-la-loi. C’est pourquoi, lorsque je dis, qu’il faut laisser le soin au PNUD de reprendre le recensement électoral et de recruter un opérateur indépendant pour la gestion de la logistique électorale, certains crient au scandale, alors qu’au vu de la pagaille orchestrée par cette CENI, notre intérêt national milite de confier ces tâches à des organismes plus qualifiés et ses commissaires se contenterons de superviser les travaux. En occident externaliser de telles missions à des entreprises privées ne choquent plus personne, ce qui compte, c’est l’efficacité et surtout la qualité du service pour les usagers du service public. C’est ainsi que des jeunes Guinéens pour s’approprier le savoir-faire indispensable pour notre développement.
C’est la bonne nouvelle que j’annonce à tous les candidats indépendants notamment, vous ne payerez pas un franc, et dites à la CENI de vous montrer l’article du Code électoral qui l’autorise à réclamer une caution pour l’élection communale. Vous devez saisir rapidement la Cour Constitutionnelle pour lui demander de faire annuler la décision illégale de la CENI.
Par Alpha Saliou Wann