Les dirigeants du continent se sont mis d’accord dimanche à Addis-Abeba pour réformer l’Union africaine. Ils étaient réunis depuis samedi dans la capitale éthiopienne. Vingt-deux chefs d’État et de gouvernement avaient fait le déplacement en personne. Cette refonte est censée rendre l’institution plus efficace, par exemple en se partageant mieux le travail entre l’UA, les organisations régionales et les États. L’exécutif va aussi être revu : la Commission de l’UA va passer de 10 à 8 membres. Elle a vocation à devenir plus indépendante.
Le but de la réforme est de lui donner plus de poids politique face aux États.
Notamment pour faire appliquer les décisions que les dirigeants eux-mêmes adoptent. Une source de l’UA avance le chiffre de seulement 10% de décisions mises en oeuvre.
Le président de la Commission doit devenir le véritable patron de son administration. Il sera toujours élu par les chefs d’État. Mais ses commissaires, eux, le seront par les ministres des Affaires étrangères. Cela instaure mieux la hiérarchie interne.
Les candidats au poste suprême de l’exécutif UA passeront par un processus digne du secteur privé : CV en ligne, profession de foi, débat télévisé et grand oral face aux dirigeants.
L’idée est de sélectionner des politiques et techniciens compétents davantage que de simples politiques bénéficiant d’arrangement entre États.
D’ici le sommet de juin prochain à Niamey, au Niger, l’actuelle équipe autour de Moussa Faki Mahamat doit plancher sur une nouvelle organisation interne : qui fait quoi et combien cela coûte aussi. Car l’institution continentale cherche également à moins et mieux dépenser.
Le nombre de commissaires va passer de 10 à 8. Parmi les autres points adoptés, le renforcement des sanctions contre les États mauvais payeurs. Elles pourront désormais aller de l’interdiction de parole à l’exclusion complète du pays des instances de l’Union africaine.
La réforme doit s’appliquer de manière progressive. Les sanctions financières sont en vigueur dès maintenant. La réforme de la Commission concernera la prochaine équipe qui sera élue en janvier 2021.
■ Analyse du sommet
« C’est la première fois qu’un sommet de chefs d’État se réunit pour parler des réformes. » C’est ce qu’affirme le Camerounais Pierre Moukoko Mbonjo, le « Monsieur réformes » de l’UA.
Le nouveau mode de nomination de la commission et notamment de ses président et vice-président va changer les choses, veut-il croire.
Il y a aura davantage de compétences, moins de politique ; la commission sera resserrée, elle se partagera mieux le travail avec les organisations régionales types Cédéao ou SADC. Les sanctions sont donc aussi durcies contre les nombreux États qui tardent à payer ou ne payent pas du tout leur contribution.
Mais des questions ont été laissées de côté : le nouveau barème des contributions justement. Repoussé à février. En deux ans, Paul Kagamé aura réussi avec ses équipes et la commission à convaincre. Le président rwandais « va avoir, comme il le voulait, son nom gravé dans l’histoire de l’UA », sourit un membre d’une délégation.
Mais il a abandonné des idées en chemin. Idées « révolutionnaires » pour un haut cadre de l’institution.
Le président de l’Union en 2018 a fait face, selon lui, aux blocages de certains pays d’Afrique Australe et d’Afrique du Nord. « C’est un processus », répond Pierre Moukoko Mbonjo.
Un processus lancé, dont il n’est pas sûr que le prochain président de l’UA, à partir de février, l’Égyptien Al-Sissi ait très envie de lui faciliter la route.
Par RFI