Abdallah Hamdok, visage civil de la transition, a démission dimanche, estimant que les différentes forces politiques du pays sont trop « fragmentées » pour parvenir à une sortie de crise.
Il jette l’éponge. Le Premier ministre Abdallah Hamdok, visage civil de la transition au Soudan, a démissionné, dimanche 2 janvier, à l’issue d’une nouvelle journée meurtrière dans le pays où les généraux sont désormais seuls aux commandes. Alors que la rumeur ne cessait d’enfler et que la presse locale assurait qu’il ne se présentait plus à son bureau depuis des jours, Hamdok a jeté l’éponge dimanche soir, expliquant longuement sur la télévision d’Etat avoir tout tenté mais avoir finalement échoué dans un pays dont la « survie » est selon lui « menacée » aujourd’hui.
Les différentes forces politiques du pays sorti en 2019 de 30 années de dictature militaro-islamiste d’Omar el-Béchir sont trop « fragmentées », a-t-il dit, et les camps civil et militaire trop irréconciliables pour qu’un « consensus » vienne « mettre fin à l’effusion de sang » et donner aux Soudanais le slogan phare de la révolution anti-Béchir de 2019: « liberté, paix et justice ». Cet ancien économiste onusien qui avait obtenu l’effacement de la dette du Soudan et sa sortie du ban mondial n’a pas connu un moment de répit depuis le coup d’Etat du 25 octobre.
Une figure de la société civile devenue un « traitre » pour les manifestants
Ce jour-là, son principal partenaire, le chef de l’armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, l’a fait placer en résidence surveillée au petit matin. Et avec lui, la quasi-totalité des civils des autorités de transition, rompant brutalement l’attelage baroque de 2019. Le général Burhane a prolongé de deux ans son mandat de fait à la tête du pays et réinstallé un mois plus tard Hamdok, tout en ayant préalablement remplacé bon nombre de responsables – notamment au sein du Conseil de souveraineté qu’il chapeaute –, en extrayant les partisans les plus actifs d’un pouvoir civil.
Aussitôt, Hamdok est devenu l’ennemi de la rue, le « traître » qui aidait les militaires à « faciliter le retour de l’ancien régime ». Les manifestants, qui depuis le 25 octobre conspuent le général Burhane dans la rue, se sont mis à le conspuer lui aussi. Car dans un pays presque toujours sous la férule de l’armée depuis son indépendance il y a 65 ans, les manifestants le clament: ils ne veulent « ni partenariat, ni négociation » avec l’armée. En tout, depuis le 25 octobre, 57 manifestants ont été tués et des centaines blessés.
AFP