Dans son rapport annuel provisoire sur l’état du climat, l’Organisation météorologique mondiale fait part de ses profondes inquiétudes sur l’accroissement alarmant des phénomènes climatiques extrêmes dans toutes les régions du monde.
Les années de 2015 à 2022 sont en passe de devenir les huit années les plus chaudes jamais enregistrées depuis le début des mesures en 1880, a annoncé l’Organisation météorologique mondiale (OMM) dans un rapport publié le 6 novembre.
Ce rapport précise que même si l’année 2022 devrait se classer « seulement » à la cinquième ou sixième place de ces années les plus chaudes, en raison de l’influence inhabituelle du phénomène océanique La Niña qui entraîne une baisse des températures, la tendance générale s’avère très mauvaise.
La moyenne décennale du réchauffement sur la période 2013-2022 est supérieure de 1,14°C [1,02 à 1,27] au niveau de la période préindustrielle de référence (1850-1900). À titre de comparaison, dans son sixième rapport d’évaluation, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a prévu une augmentation de 1,09 °C entre 2011 et 2020.
L’OMM, qui publiera son évaluation définitive de l’état du climat en 2022, en janvier prochain, a également précisé que les manifestations et les répercussions du changement climatique sont de plus en plus spectaculaires.
En Afrique de l’Est, les précipitations ont été inférieures à la moyenne pendant quatre saisons humides consécutives, ce qui n’était jamais arrivé en 40 ans, et tout porte à croire que la saison actuelle pourrait également être sèche.
En raison de la sécheresse persistante et d’autres facteurs aggravants, on estime que 18,4 millions à 19,3 millions de personnes ont été confrontées à une crise alimentaire ou à une insécurité alimentaire aiguë avant juin 2022. Les organismes humanitaires préviennent qu’une autre saison de précipitations inférieures à la moyenne entraînera probablement des mauvaises récoltes et exacerbera encore l’insécurité alimentaire au Kenya, en Somalie et en Ethiopie.
L’Afrique australe a été, quant à elle, frappée par une série de cyclones, qui ont entraîné important accroissement des besoins de protection et d’hébergement pour des centaines de milliers de personnes touchées, y compris des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur pays.
Des inondations ont été aussi enregistrées dans la région du KwaZulu-Natal, dans l’est de l’Afrique du Sud, avec des précipitations totales atteignant 311 mm en 24 heures les 11 et 12 avril dernier. 400 décès ont été attribués à ces inondations, qui ont également entraîné le déplacement de 40 000 personnes, avec des impacts directs sur les transports, les bâtiments et les infrastructures hydrauliques.
Forte élévation du niveau de la mer
Alors que des pluies diluviennes se sont abattues en 2021 et en 2022 sur de nombreuses régions d’Afrique australe, une sécheresse localisée à long terme, persiste dans certaines zones, en particulier dans le sud de Madagascar où les précipitations totales ont été inférieures à la moyenne depuis 2011.
Le contenu thermique de la surface océanique jusqu’à une profondeur de 2000 mètres a par ailleurs continué à se réchauffer et a battu des records. En 2022, les vagues de chaleur ont concerné 55 % de la surface océanique. En revanche, 22 % seulement de la surface océanique a subi une vague de froid. Les vagues de chaleur marines sont de plus en plus fréquentes, contrairement aux vagues de froid marines.
Publié à l’ouverture de la 27e conférence des Nations unies sur le climat (COP27), qui se tient jusqu’au 18 novembre à Charm El-Cheikh (Egypte), le rapport fait d’autre part ressortir que le niveau de la mer s’élève à un rythme qui a doublé depuis 1993. Il a augmenté de près de 10 mm depuis janvier 2020 et battu un nouveau record cette année. Ainsi, la hausse de ces deux dernières années et demie représente à elle seule 10% de l’augmentation globale du niveau de la mer observée depuis le début des mesures par satellite, il y a près de 30 ans.
De son côté, la fonte des glaciers a battu des records en 2022. Dans l’ensemble des Alpes, on a mesuré des pertes d’épaisseur moyennes comprises entre 3 mètres et plus de 4 mètres, soit nettement plus que lors de l’année record précédente, en 2003.
En Suisse, selon les premières mesures, les glaciers ont perdu 6 % de leur volume de glace entre 2021 et 2022. Pour la première fois de l’histoire, aucune neige n’a survécu à la saison estivale, même sur les sites de mesure en haute altitude, et il n’y a donc pas eu d’accumulation de glace fraîche. Entre 2001 et 2022, le volume de glace des glaciers suisses est passé de 77 km3 à 49 km3, soit une diminution de plus d’un tiers.
« Trop souvent, ce sont ceux qui contribuent le moins au changement climatique qui en souffrent le plus, comme nous l’avons vu avec les terribles inondations au Pakistan et la sécheresse meurtrière qui sévit depuis longtemps dans la corne de l’Afrique. Toutefois, cette année, même les sociétés bien préparées ont été ravagées par les extrêmes, tels que les vagues de chaleur et les sécheresses prolongées dont ont pâti une grande partie de l’Europe et le sud de la Chine », a commenté le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas, cité dans le rapport. Et d’ajouter : « Plus le réchauffement est important, plus les impacts sont graves. Les concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone sont si élevées que le seuil de 1,5°C fixé dans l’Accord de Paris est à peine à notre portée ».
Agence Ecofin