L’Organisation mondiale de la santé ambitionne de vacciner au moins 360.000 enfants africains contre le paludisme d’ici à 2020, un premier test grandeur nature pour le vaccin le plus avancé mais à l’efficacité limitée contre cette maladie qui tue chaque année des centaines de milliers d’Africains.
Ce « programme pilote », annoncé lundi à Nairobi, sera mené au Kenya, au Ghana et au Malawi, trois pays ayant participé à de précédents tests à plus petite échelle du « Mosquirix » (aussi appelé RTS,S), mis au point par le géant pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline (GSK) en partenariat avec l’ONG Path malaria vaccine initiative pour protéger les enfants en bas âge.
Combiné à des méthodes de diagnostic, des traitements et des mesures de prévention éprouvés, comme les moustiquaires imprégnées de répulsif anti-moustique, « ce vaccin pourrait sauver des dizaines de milliers de vies en Afrique », a déclaré à l’AFP Matshidiso Moeti, directrice de la branche africaine de l’OMS. « C’est une arme parmi d’autres ».
L’Afrique est de très loin le continent le plus touché par le paludisme, comptant pour 92% des 429.000 personnes tuées dans le monde en 2015 par cette maladie transmise par des moustiques et également appelée malaria, selon des chiffres de l’OMS. Les enfants de moins de cinq ans représentent plus des deux tiers de ces décès.
« Les informations rassemblées lors de ce programme pilote nous aideront à prendre les décisions pour une utilisation plus large de ce vaccin », a ajouté lundi Mme Moeti, à la veille de la journée mondiale du paludisme.
– Plasmodium falciparum –
De 2018 à 2020, l’OMS ambitionne de vacciner 120.000 enfants de moins de deux ans dans chacun des pays sélectionnés pour ce projet pilote. Seront prioritaires les zones les plus touchées par cette maladie, caractérisée par des épisodes cycliques de fièvre plus ou moins graves pouvant notamment être accompagnés de diarrhées, vomissements ou maux de tête.
Le Mosquirix, qui avait reçu en juillet 2015 un avis positif de l’Agence européenne du médicament (EMA), agit contre le plasmodium falciparum, la variante la plus mortelle du parasite responsable du paludisme, mais il ne garantit pas une immunisation.
Selon des tests menés de 2009 à 2014 sur 15.000 personnes au Kenya, au Ghana, au Malawi, au Burkina Faso, au Gabon, au Mozambique et en Tanzanie, il permet surtout de réduire de 40% le nombre d’épisodes paludiques, principalement les épisodes « graves » nécessitant une hospitalisation, a expliqué à l’AFP Mary Hamel, responsable pour l’OMS de la coordination du programme de vaccination antipaludique.
Le vaccin, dont le développement a débuté dans les années 80, agit au moins pendant 4 ans et demi.
« Ce n’est pas un taux d’efficacité très élevé, mais quand on regarde le nombre de personnes touchées par la malaria, cela signifie que l’impact sera quoi qu’il arrive énorme », assure toutefois Mme Hamel.
– Vaccins plus efficaces –
Ce programme pilote doit permettre d’évaluer l’efficacité du vaccin « dans le contexte d’un usage routinier » ainsi que les éventuels obstacles logistiques. Il s’agira notamment de sensibiliser les parents au cycle de vaccination antipaludique, qui ne correspond pas au cycle traditionnel de vaccination des enfants (DTP, rougeole, etc) et implique donc des visites supplémentaires dans les centres médicaux.
Quatre doses du vaccin doivent être injectées à l’enfant: lorsqu’il est âgé de 5 mois, 6 mois, 7 mois et 2 ans.
Le programme s’inscrit dans le cadre des efforts déployés depuis les années 90 pour éradiquer le paludisme. Entre 2000 et 2015, le nombre de personnes décédées de cette maladie a diminué de 62% alors que les moustiques qui le véhiculent craignent de moins en moins les insecticides.
En 2015, 114 millions de personnes au total étaient infectées par le parasite du paludisme en Afrique sub-saharienne. L’objectif de l’OMS est de réduire le nombre de personnes tuées par la malaria de 90% en 2030 par rapport aux 429.000 enregistrées en 2015.
« A l’avenir, il y aura d’autres vaccins plus efficaces », estime Mme Hamel, rappelant que d’autres vaccins sont en cours de développement, notamment par le laboratoire américain Sanaria. « En attendant, ceci aura déjà une influence considérable ».
AFP