Un homme soupçonné de crimes contre l’humanité au Liberia dans les années 1990, durant la guerre civile qui a sévi dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, a été mis en examen et écroué jeudi en France.
Kunti K., ressortissant libérien naturalisé néerlandais, a été interpellé mardi en région parisienne à Bobigny (Seine-Saint-Denis), a indiqué à l’AFP le colonel Eric Emeraux, commandant de l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCHGCG), qui a mené l’opération conjointement avec les gendarmes d’élite du GIGN.
Cet homme né en 1974 « aurait été commandant au sein de l’ULIMO (United Liberation Movement of Liberia for Democracy), faction de trois groupes armés » s’opposant au mouvement de l’ancien président libérien Charles Taylor (le Front national patriotique du Liberia, NPFL, qui avait déclenché la guerre au Liberia fin 1989), au moment de la première guerre civile dans ce pays, a indiqué pour sa part une source judiciaire.
Il est soupçonné d’actes de torture, d’utilisation d’enfants soldats, de meurtres, d’actes de cannibalisme et de mise en esclavage, entre 1993 et 1997, selon cette même source.
L’homme, qui se cachait chez un ami au moment de son interpellation, « avait rejoint la France en 2016, après avoir quitté les Pays-Bas et être passé par la Belgique », a expliqué le colonel Eric Emeraux.
Le pôle « crimes contre l’humanité, crimes et délits de guerre » du parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire à la suite d’une plainte déposée le 23 juillet 2018 par l’ONG Civitas Maxima, et lancé un mandat de recherche à son encontre, selon la source judiciaire.
« Actes de torture »
A l’issue de la garde à vue, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire et le suspect a été mis en examen pour actes de torture en réunion par l’usage d’une arme, et actes de torture constitutifs de crimes contre l’humanité.
Contactée par l’AFP, Civitas Maxima n’a pas souhaité faire de commentaires. Cette ONG basée à Genève, qui défend les victimes de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, a pour but de « faciliter la documentation des crimes internationaux », et de développer « une coopération à l’échelle globale entre victimes, enquêteurs, avocats indépendants, et autorités étatiques », selon son site.
Elle a contribué à l’arrestation de plusieurs personnes liées à la guerre civile au Liberia, l’un des plus atroces conflits du continent africain qui a fait quelque 250.000 morts entre 1989 et 2003. Parmi elles, Agnes Taylor, une ancienne épouse de Charles Taylor, ou encore Mohammed Jabateh, un ancien commandant de l’ULIMO condamné en avril dernier à 30 ans de prison aux Etats-Unis.
L’ex-président Charles Taylor (1997-2003) a pour sa part été condamné par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) en 2012 à 50 ans de prison pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis dans ce pays voisin du Liberia. Sa condamnation a été confirmée en 2013 et il purge sa peine en Grande-Bretagne.
AFP