Les indicateurs du changement climatique dans le rouge après une année de chaleur record, alerte l’ONU

L’année 2023 est de loin l’année la plus chaude jamais recensée et l’Organisation mondiale de la météorologie rapporte que les records de températures ne sont pas les seuls à avoir été battus, « voire pulvérisés ». L’organisme onusien publie ce mardi 19 mars son rapport annuel « L’état du climat mondial » qui donne « un sens nouveau et alarmant à l’expression « hors normes » », malgré une lueur d’espoir.

Qu’il s’agisse de dioxyde de carbone (CO2), de méthane (CH4) ou de protoxyde d’azote (N2O), les émissions de gaz à effet de serre ont atteint des niveaux jamais égalés en 2022, la dernière année pour laquelle l’Organisation mondiale de la météorologie (OMM) dispose de données d’ensemble. Les premières données pour 2023 montrent « une augmentation continue ».

Ces gaz à effet de serre piègent la chaleur dans l’atmosphère et sont les grands responsables du changement climatique. Ils résultent des activités humaines, notamment la combustion d’énergies fossiles, l’agriculture intensive ou les procédés industriels et restent présents plusieurs dizaines d’années dans l’air (près de 100 ans pour le CO2 par exemple). Les températures continueront donc à augmenter pendant de nombreuses années même si l’humanité cessait de libérer ces gaz dans l’atmosphère.

La moyenne mondiale des températures a frisé l’année dernière la limite de +1,5 degré par rapport aux années 1850-1900, c’est-à-dire avant la révolution industrielle et le début des émissions massives de gaz à effet de serre. Cette limite a été fixée par les États du monde entier lors de la COP21 et l’Accord de Paris en 2015. Elle correspond, selon les scientifiques, à un seuil au-delà duquel nos modes de vie sont menacés. Heureusement, ce n’est pas en tenant compte des relevés climatiques d’une seule année que ce seuil est considéré comme dépassé mais en réalisant une moyenne sur un temps long. « La moyenne décennale 2014-2023 des températures est ainsi à +1,2 degré », relève l’OMM. En 2023, « les mois de juin à décembre ont tous battu des records de chaleur ». Cela est dû au changement climatique mais aussi au phénomène El Niño, événement naturel et cyclique qui augmente encore les températures mondiales, rappelle le rapport.

La chaleur accumulée dans l’océan a atteint en 2023 son niveau le plus haut en 65 ans d’observations, selon l’OMM. Des vagues de chaleur généralisées ont frappé notamment l’Atlantique Nord, surtout en fin d’année, avec une chaleur jugée « sévère et extrême » par les experts, à cause de températures dépassant de 3°C la moyenne. Elles étaient « intenses et sévères en Méditerranée pour la 12e année consécutive », note également le rapport. Vu l’immense masse d’eau que les océans représentent, les réchauffer prend beaucoup de temps… mais les refroidir aussi. Ainsi, même si les émissions de gaz à effet de serre s’arrêtaient immédiatement, ils mettraient des siècles voire des millénaires à refroidir, alerte l’OMM. Les conséquences sont l’augmentation du niveau des mers ainsi qu’une faune et une flore perturbées ou fragilisées avec des répercussions pour les populations qui vivent sur les côtes et de la pêche.

L’année dernière, le niveau des mers et des océans n’a jamais autant grimpé depuis le début des relevés satellites en 1993. Cependant, « de juillet à septembre 2023, la signature d’El Niño dans cette hausse est clairement visible ». Pour connaître l’effet du changement climatique, il convient donc de regarder les tendances de long terme. Ainsi, le taux d’augmentation du niveau des mers est passé de 2,13 mm par an durant la décennie 1990 à 4,77 mm ces dix dernières années.

Si le niveau des mers augmente, c’est parce que des eaux chaudes sont plus dilatées (elles prennent plus de place) que des eaux froides, mais aussi parce que les glaciers des pôles et des montagnes fondent de plus en plus, ce qui ajoute une grande quantité d’eau dans l’océan.

« Les premières données montrent que dans le monde les glaciers ont perdu en moyenne l’équivalent d’1,2 mètre d’épaisseur de glace en 2023 », selon l’OMM. Cela a été particulièrement remarquable en Europe et Amérique du Nord, à cause d’un hiver très doux. Dans les Rocheuses canadiennes, les glaciers ont perdu trois mètres l’hiver par exemple. Les glaciers sont en effet formés à partir de neige compactée. Or il neige de moins en moins. Sur le continent nord-américain, le manteau neigeux était de 7,47 millions de km² en mai 2023, soit 1,57 million de km² de moins que la moyenne. C’est autant d’eau douce qui n’est plus disponible pour les populations et les écosystèmes.

L’ensemble de ces données scientifiques se traduisent par des événements météorologiques extrêmes en 2023, dont l’OMM fait la triste liste. Dans la corne de l’Afrique, les inondations après des années de sécheresses ont entraîné le déplacement de 1,8 million de personnes. En Libye, elles ont coûté la vie à environ 10 000 personnes. L’ouragan Otis a frappé la station balnéaire mexicaine d’Acapulco, engendrant des pertes économiques estimées à environ 15 milliards de dollars. Des vagues de chaleur extrêmes ont déferlé sur de nombreuses régions du monde avec les canicules les plus importantes en Europe et en Afrique du Nord (50,4 °C relevés à Agadir au Maroc par exemple). Les sécheresses se multiplient également, provoquant la perte de récoltes et le manque d’eau en Espagne, en Uruguay ou en Argentine. La saison des incendies au Canada a également été la pire jamais enregistrée avec près de 15 millions d’hectares de forêt partis en fumée.

« Ces catastrophes coûtent cher en vies humaines, elles dévastent les économies, associées à d’autres crises comme les conflits locaux ou les guerres, elles aggravent les problèmes de sécurité alimentaires, les déplacements de population et les répercussions sur les populations vulnérables », explique Omar Badour, responsable du suivi du climat mondial à l’OMM.

« Il y a une lueur d’espoir », note Omar Badour. La production d’énergies renouvelables (solaire, éolien, hydrique) a été propulsée au premier plan de l’action climatique. Une transition énergétique est déjà en cours à l’échelle mondiale, estime-t-il et, « chose très positive, les technologies deviennent moins chères et accessibles à tout le monde. Il y a déjà des pays qui ont franchi les 40% d’énergies renouvelables » dans leur production d’électricité. Toutefois, cela reste insuffisant pour une planète bas carbone. Quant aux financements en faveur de l’action climatique, « ils ont atteint 1 300 milliards de dollars en 2021-2022 soit presque le double de l’année précédente », selon le rapport. Mais là encore, cela reste largement insuffisant : « Ils ne représentent que 1% du PIB mondial ». Les besoins sont de « 9 000 milliards de dollars chaque année d’ici à 2030 et 10 000 milliards de plus jusqu’en 2050 pour un monde à +1,5 °C ». Ne rien faire coûterait encore plus cher, préviennent les scientifiques.

RFI

 

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