Plus d’un an d’épidémie, le virus Ebola a causé un effet dévastateur sur les économies de la Sierra Leone, de la Guinée et du Liberia, une grave crise humanitaire responsable d’un énorme chantier de reconstruction pour lequel l’Union africaine (UA) appelle à libérer les trois pays affectés du fardeau de leurs dettes extérieures évaluées à un total de 3,1 milliards de dollars en 2013.
« Je soutiens l’annulation de la dette des trois pays », a déclaré lundi à Malabo en Guinée équatoriale Abdalla Hamdok, secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), en marge des travaux d’une conférence internationale organisée par l’UA sur la lutte de l’Afrique contre Ebola.
L’épidémie qui sévit en ce moment est décrite comme étant la plus longue et la plus complexe depuis l’apparition du virus d’Ebola en 1976 au Soudan et en République démocratique du Congo (RDC), anciennement Zaïre. Elle avait refait surface en décembre 2013 en Guinée avant d’être déclarée officiellement en mars 2014 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Le Sénégal, le Mali et le Nigeria, faiblement touchés, ont réussi à juguler rapidement la circulation de la maladie sur leurs sols respectivement. Ce n’est pas le cas en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia où la menace persiste, causant 11.262 décès sur 27.642 cas enregistrés, selon le dernier bilan publié le 15 juillet par l’OMS.
Une semaine auparavant, cette agence onusienne avait prévenu dans un communiqué qu' »il faudra encore de nombreux mois de travail énergique pour mettre fin à la flambée et éviter qu’elle ne se propage à d’autres pays ».
Dans la capitale équato-guinéenne, les pays de l’Union africaine se sont donné rendez-vous pour une réunion de haut niveau précédée dimanche d’une journée de discussions sur l’opérationnalisation du projet de création d’un centre de prévention et de contrôle des maladies en Afrique et qui prévoit d’être couronnée mardi par un sommet de chefs d’Etat.
D’après le programme officiel, l’objectif de ces assises est de « discuter des différentes formes d’assistance économique que la communauté internationale et les pays africains peuvent apporter à la Guinée, au Liberia et à la Sierra Leone pour aider à la reprise et à la reconstruction post-épidémie Ebola ».
Pour l’organisation panafricaine, il s’agit de témoigner une solidarité encore plus agissante à l’égard des trois pays en crise afin de les aider à se relever du marasme socioéconomique causé par l’épidémie. D’après les estimations officielles, la croissance économique initialement projetée à 4,5% s’est contractée à 1,1% en 2014 et les autorités de Conakry s’attendent à une croissance nulle en 2015.
C’est la résultante des effets combinés d’Ebola et de la chute des cours des matières premières agricoles et minières dont ce pays est pourvoyeur. Pareil pour la Sierra Leone qui table pour sa part sur un fléchissement de 23% de sa croissance, qui s’était pourtant positionnée ces dernières années comme l’une des plus vigoureuses du continent, après avoir atteint 20,1% en 2013 et 15,2% l’année précédente.
Au Liberia, la tendance n’est guère non plus meilleure, les analyses du département des affaires économiques de la Commission de l’UA faisant état d’une croissance de 1,8% en 2014 contre 8,7% l’année d’avant prévoient que « cet impact négatif se poursuivra dans le moyen terme ».
L’organisation continentale constate que « l’épidémie a un impact sur les restrictions sur la mobilité, les échanges commerciaux et les transports du fait des quarantaines imposées et des clôtures des frontières. Ces mesures ont à leur tour réduit les échanges commerciaux aux niveaux interne et régional, ainsi que les transports et le tourisme ».
Les trois pays se sont dotés de plans de redynamisation socioéconomique qui comportent un relèvement de leurs systèmes réputés fragiles pour juguler les situations d’urgence comme la menace Ebola. Au Liberia, les besoins de financement sont chiffrés à 306 millions de dollars pour le moyen terme et 2,3 milliards de dollars pour le long terme.
Pour les trois années à venir, la Sierra Leone, elle, envisage de mobiliser un total de 801,3 millions de dollars dont 377,1 millions de dollars pour la résilience zéro à Ebola. De son côté, la Guinée déclare un budget d’investissement de 1,765 milliard de dollars, avec 63% consacré à la santé, la nutrition, l’eau, l’assainissement et l’hygiène.
Selon l’UA, des promesses de 5,2 milliards de dollars ont été annoncées pour venir en aide à ces pays. Une levée de fonds est programmée lors de la conférence tenue à Malabo.
« Au-delà d’une simple volonté étatique basée sur des documents de travail, il est important que cette conférence puisse se traduire par un engagement réel pris par les pays à travers leurs différentes actions développées sur le terrain », a souligné le ministre équato-guinéen des Affaires étrangères et de la Coopération, Agapito Mba Mokuy.
« Nous voulons, a-t-il ajouté, que les résultats se fassent ressentir positivement dans la réalité quotidienne de chaque habitant issu des villages et villages du Liberia, de la Sierra Leone, de la Guinée et partout ailleurs en Afrique ».
De l’avis du ministre zimbabwéen des Affaires étrangères, Simbarashe Mumbengegwi, « l’épidémie d’Ebola a été un avertissement sans frais ».
A l’unanimité, les participants à la conférence se sont prononcés pour l’accélération de l’opérationnalisation du projet de création d’un centre de prévention et de contrôle des maladies en Afrique prévu d’être implanté à Addis-Abeba, siège de l’UA en Ethiopie, après sa validation par les chefs d’Etat et de gouvernement du continent en janvier.